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Après plus de trois ans de guerre et plusieurs trains de sanctions, Moscou continue de susciter autant de passions que de mystères.

 

Après plus de trois ans de guerre et plusieurs trains de sanctions, Moscou continue de susciter autant de passions que de mystères.

Dans la propagande occidentale, la Fédération de Russie apparaît comme un pays ruiné par la guerre, mis au ban des nations, et réduit à un quasi-protectorat de l’Empire du Milieu. À l’opposé, selon les médias alternatifs, la Russie est présentée comme un pays d’opportunités, qui a su se réorienter stratégiquement vers l’Asie, l’Amérique latine et l’Afrique  regroupés sous l’appellation de "Sud global" dans la terminologie occidentale.

Dans les lignes qui suivent, nous allons décortiquer ces deux paradigmes opposés pour tenter d’y voir plus clair. Le 22 février 2022 marque le début de ce que Moscou qualifie "d’opération militaire spéciale", tandis que les pays occidentaux y voient une guerre d’agression contre l’Ukraine. Cette guerre, loin d’être un événement spontané, puise ses racines profondes dans des événements antérieurs, notamment la Révolution orange de 2004 et le renversement du pouvoir pro-russe lors du soulèvement de Maïdan en 2014, que certains qualifient de coup d’État soutenu par l’Occident.

Aux yeux du Kremlin, cette intervention militaire avait pour but de protéger les populations russophones et russophiles vivant à l’est de l’Ukraine, des communautés issues de l’éclatement de l’Union soviétique en 1991 et qui se retrouvent depuis dispersées dans plusieurs ex-républiques soviétiques. Par ailleurs, Moscou invoque un engagement verbal remontant à la fin de la Guerre froide : lors des négociations pour la réunification de l’Allemagne, Mikhaïl Gorbatchev aurait reçu l’assurance que l’OTAN ne s’étendrait pas vers l’Est, notamment dans les anciens pays du Pacte de Varsovie. Selon cette lecture historique, l’élargissement progressif de l’OTAN constitue une violation de cet accord tacite et une menace directe pour la sécurité nationale de la Russie.

C’est dans ce contexte que Vladimir Poutine estime avoir l’obligation de corriger ce qu’il considère comme une injustice historique majeure, en tentant de restaurer une forme de sphère d’influence russe sur son « étranger proche ». Face à cette guerre, les pays occidentaux au premier rang desquels les États-Unis, le Royaume-Uni, le Japon et l’Union européenne  ont adopté une série de sanctions économiques sans précédent à l’encontre de Moscou, dans le but affiché de faire plier la position du Kremlin. On se souvient notamment de la déclaration du ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire, affirmant : « Nous allons mener une guerre économique totale à la Russie. » Cette annonce résumait l’intensité de la riposte occidentale.

Parmi les mesures emblématiques figurent :

L’exclusion de Moscou du système de paiement interbancaire SWIFT, réduisant fortement sa capacité à effectuer des transactions financières internationales.

Le blocage du projet gazier Nord Stream II, censé renforcer l’approvisionnement énergétique de l’Europe en provenance directe de la Russie.

Le départ massif de grandes entreprises occidentales telles que L’Oréal, McDonald’s, KFC, IKEA et bien d’autres, marquant un désengagement économique et symbolique.

La confiscation des avoirs de l’État russe détenus dans les banques européennes et américaines.

Le gel des avoirs de plusieurs oligarques russes, proches du pouvoir, censés exercer une influence sur le président Poutine.


Ces sanctions visent à isoler la Russie économiquement, à tarir les ressources financières de l’État russe, et à provoquer un changement de cap stratégique à travers une pression politique et sociale interne. Malgré l’ampleur des sanctions occidentales, la Fédération de Russie a su réorienter son économie vers de nouveaux partenaires stratégiques.
Parmi ces partenaires figurent la République populaire de Chine, l’Inde, la Turquie, les Émirats arabes unis, ainsi que plusieurs pays d’Afrique et d’Asie centrale, notamment le Kazakhstan, l’Ouzbékistan et l’Azerbaïdjan. Ces États servent non seulement de relais commerciaux, mais aussi de plateformes pour contourner une partie des sanctions économiques imposées par les États-Unis et l’Union européenne.

Grâce à cette réorientation, l’économie russe a montré une résilience notable. Au premier trimestre de l’année en cours, la Russie a affiché un taux de croissance supérieur à celui de la zone euro, avec une progression d’environ 1 %. Par ailleurs, la Fédération de Russie demeure un acteur central dans plusieurs secteurs clés à l’échelle mondiale :

Premier exportateur mondial de blé, contribuant largement à la sécurité alimentaire de nombreux pays du Sud.

Fournisseur majeur d’engrais chimiques, essentiels pour l’agriculture mondiale.

Exportateur stratégique de gaz naturel, notamment via ses relations renforcées avec la Chine et d'autres pays non alignés sur les sanctions.

L’industrie manufacturière russe représente environ 33 % du PIB, un chiffre élevé qui témoigne de la solidité de son tissu productif. Par ailleurs, selon la mesure en parité de pouvoir d’achat (PPA), la Russie se classe actuellement comme la quatrième économie mondiale, derrière la Chine, les États-Unis et l’Inde.

Le pays poursuit également ses ambitions industrielles, avec le développement d’avions comme le Sukhoï Superjet 100, symbole d’une volonté de souveraineté technologique face à l’isolement occidental. Sur le plan intérieur, la vie quotidienne du citoyen russe moyen ne semble pas avoir été profondément bouleversée. Des programmes sociaux innovants ont été mis en œuvre pour soutenir le pouvoir d’achat, moderniser les infrastructures, et maintenir une certaine stabilité économique. Moscou, en tant que capitale, incarne aujourd’hui à la fois la puissance politique et la résilience économique de la Fédération de Russie. Un pays dont les dirigeants prennent des décisions pragmatiques, affranchies des dogmes idéologiques, est capable de surmonter les défis économiques , même face à la pression d’un Occident devenu numériquement minoritaire sur la scène mondiale.

Auteur : Joseph Wilfrid 

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