Partir ou se taire : ma part de lâcheté
Partir ou se taire : ma part de lâcheté Je fais partie de cette génération qui a quitté le pays. Comme beaucoup de jeunes, j’ai choisi le départ plutôt que l’affrontement, la survie individuelle plutôt que le combat collectif. Et aujourd’hui, je dois le reconnaître : ce choix, aussi compréhensible, soit-il, porte en lui une part de lâcheté. Nous invoquons l’insécurité, l’absence d’avenir, l’effondrement de l’État. Tous ces arguments sont réels. Mais ils ne suffisent pas à nous absoudre totalement. Car pendant que nous partions, le pays était pillé, ses institutions vidées de leur sens, et sa jeunesse réduite à l’exil ou au silence. Et nous avons, par notre départ, laissé faire. Partir n’est pas un crime. Mais partir sans jamais regarder en face ce que l’on abandonne, sans jamais interroger notre responsabilité morale, en est un autre. En quittant le pays, nous avons aussi quitté l’arène. Nous avons cessé de déranger, de résister, de peser. Nous avons laissé le champ libre avec ce...